SHERBROOKE– En cette froide journée de la Saint-Valentin, nous étions plus de 200 personnes dans l’église Immaculée-Conception pour rendre un dernier hommage à Claude (Piton) Ruel, un petit homme qui avait le coeur gros comme le Forum de Montréal.
Avec les témoignages qui se succédaient tour à tour, les propos du curé Giguère et la messe proprement dite, on aurait cru que Piton voulait passer une heure de plus avec les «p’tits gars» qu’il a tant aimés avant de s’accorder le repos éternel.
C’est le grand Serge Savard, toujours aussi fier et imposant, qui a pris la parole au nom de ses anciens coéquipiers. «Au printemps 1968, Claude a fait la promesse d’adopter un enfant si on gagnait la coupe Stanley, a-t-il rappelé. Si on avait perdu, probablement que son fils Jean ne serait pas ici aujourd’hui. Claude a été mon patron, puis j’ai été son patron, mais nous avons surtout été de très bons amis. Je lui dis merci d’avoir été là pour nous tous. Son souvenir restera impérissable».
Les Glorieux des années 1970 étaient bien représentés dans mini-cathédrale du boulevard Alexandre: Flower, Pointu, le Roadrunner, Mario, Yvon, le Mousse, Peanut et Chris Nilan. Il y en a quatre ou cinq qui ont fait le voyage en hélicoptère avec Lafleur. Les autres ont préféré l’automobile. Il y avait aussi Ronald Corey, Patrice Brisebois et bien d’autres personnes qui ont gravité dans l’univers de Ruel.
Voici d’autres témoignages:
Le curé GERVAIS GIGUÈRE: «Claude était un ami d’enfance. Je pense qu’on peut dresser un certain parallèle entre lui et JEAN BÉLIVEAU (son idole). Les trophées et les statistiques ont leur importance, mais pas autant que les qualités humaines. Claude était un homme simple, humble et généreux avec un peu d’orgueil bien placé. Il avait une grande FOI. Il disait son chapelet chaque jour, il allait à la messe le dimanche et rendait visite aux communautés religieuses. Il était profondément un homme BON».
JEAN RUEL, fils du disparu: «Merci, les gars, d’avoir gagné la coupe en 1968! Grâce à vous, je suis devenu un de ses p’tits gars. Même s’il était souvent parti de la maison à cause de son travail, Claude a été un bon père. Il m’a enseigné à AIMER les autres, parfois même un peu trop. Il pensait toujours aux autres avant de penser à lui-même. Il avait aussi beaucoup de respect pour les PARTISANS du Canadien. Il nous répétait que c’était grâce à eux si nous faisions une si belle vie. Quand il s’asseoyait devant la télé pour regarder une partie de hockey, de baseball ou de football ou même un film de JOHN WAYNE, il leur disait toujours quoi faire!»
PIERRE MONDOU: «Comme recruteur, j’ai voyagé avec lui pendant 17 ou 18 ans. Il était notre mentor. Il n’était pas docteur en hockey, mais il avait du feeling et un très bon jugement. Durant les années 1970, il formait le duo parfait avec SCOTTY BOWMAN. C’est lui qui s’occupait de l’enseignement parce que Scotty ne nous parlait presque pas. Il a été extraordinaire avec les jeunes joueurs du Canadien».
STÉPHANE PILOTTE, recruteur des Ducks d’Anaheim: «J’étais avec Claude durant la dernière journée de sa vie. Nous avons souvent voyagé ensemble et il y a un tas d’histoires que je ne peux pas vous raconter, par respect pour lui. Il souhaitait rester dans L’OMBRE, mais il avait encore la passion du hockey. Il doit avoir vu plus de 150 parties cet hiver. Il analysait le travail de tous les joueurs sans exception, souvent jusqu’à minuit le soir, et il avait toujours le bon conseil. Il voulait aider les jeunes à réussir».
CHRIS NILAN, le Yankee Boy à Piton: «Je n’oublierai jamais ce que Claude a fait pour moi. Il ne me regardait pas juste comme un batailleur. Il croyait tellement en moi qu’il m’a aidé à connaître une saison de 21 buts».
RICHARD DUVAL, son neveu: «Il était tellement passionné et il aimait tellement le Canadien. Claude était un homme généreux et un rassembleur. Il m’a souvent parlé de ses exploits au baseball durant sa jeunesse. Il en a frappé des circuits par-dessus le cinéma Rex!»
JULIEN DUPONT, ancien joueur des Cataractes de Shawinigan: «J’étais souvent avec lui. J’ai dû insister pour qu’il assiste aux funérailles de Jean Béliveau. Il était un «loner», un homme profondément religieux».
SERGE GRÉGOIRE, de Sherbrooke: «J’ai été son coéquipier dans la catégorie bantam au début des années 1950. On jouait pour l’équipe du Marché Jacques. Claude était tout un joueur de hockey. Il possédait un excellent coup de patin et un puissant lancer. Je suis certain qu’il aurait joué dans la Ligue nationale s’il n’avait pas perdu un oeil accidentellement à Belleville, Ontario. Au baseball, il avait assez de talent pour être invité au camp des recrues des Indians de Cleveland».
FRANÇOIS (Lou) OUIMET, de la Ligue des Bons Vivants à Montréal-Est: «Nous étions souvent avec Claude à l’Hippo-Club de Boucherville. Il adorait les courses sous harnais et discuter de hockey avec ses amis. Il n’a jamais digéré d’avoir été mis de côté par la direction du Canadien à la fin des années 1990. Ça lui a brisé le coeur».
P.S. Victoire de 2-1 contre les Maple Leafs en tirs de barrage. Rien pour écrire à sa mère! Bon dimanche.