Bobby Orr, meilleur joueur de sa génération et probablement de tous les temps, fêtait hier ses 66 ans. Ça nous fait tous vieillir un peu.
«À 15 ans, Bobby était déjà le meilleur joueur de la puissante Ligue Junior de l’Ontario (OHA), se souvient Serge Savard. Au début, il jouait à Bowmanville parce que la construction de la nouvelle patinoire d’Oshawa n’était pas complétée. Son entrée en scène se compare un peu à celle de Wayne Gretzky. Il était la «merveille», celui dont tout le monde parlait. Dans le temps, il fallait terminer son stage chez les Juniors avant d’entrer dans la Ligue nationale. Bobby y était à 18 ans».
Savard a joué contre Orr pendant trois ans chez les juniors, puis il l’a affronté des dizaines de fois dans la Ligue nationale. Il a aussi été son coéquipier au sein d’Équipe Canada en 1976. Le grand Serge considère cette équipe comme la meilleure jamais assemblée.
À deux pour contrer ses efforts
Vainqueur du trophée Conn Smythe huit fois d’affilée, Bobby Orr a mené les Bruins à deux conquêtes de la coupe Stanley (1970 et 1972), méritant chaque fois le trophée Conn Smythe. Il a cependant mal digéré sa défaite contre le Canadien en 1971 et celle contre les Flyers au printemps 1974.
«J’ai toujours dit que Bobby était dans une classe à part, ajoute Savard. Il y avait les vedettes et les supervedettes, puis il y avait Bobby Orr. Toutefois, les Bruins ne nous ont jamais battus dans les séries. On utilisait deux joueurs pour contrer ses efforts et on faisait de l’échec-avant pour essayer de l’empêcher de se mettre en deuxième vitesse. C’est Toe Blake qui avait imaginé ce stratagème.
«Les Bruins avaient plusieurs joueurs de talent, mais ils ne formaient pas une meilleure équipe que la nôtre. Je pense qu’ils auraient dû gagner plus que deux coupes Stanley, mais ils ne l’ont pas fait. Ça n’enlève rien au talent de Bobby Orr. Est-ce qu’on peut dire que Peyton Manning est un «choker» parce qu’il a gagné le Super Bowl seulement une fois?
«Je considère Bobby comme mon ami. Nous sommes allés à la pêche ensemble une couple de fois en Abitibi et nous avons joué au golf. Il est gaucher comme moi, mais il a plus de talent! Ce que j’aime de lui, c’est qu’il est resté un homme simple. Quand il jouait pour Boston, tous les joueurs autour de lui devenaient meilleurs».
Call him God
Carol Vadnais, un autre produit du Canadien Junior, en a bavé un coup chez les minables Golden Seals de la Californie avant d’être échangé aux Bruins au début des années 1970.
Non seulement a-t-il eu le privilège de jouer avec Orr pendant trois ans et demi, mais il était assis à ses côtés dans le vestiaire.
«Bobby était une coche au-dessus de tout le monde, rappelle-t-il. On était ses subalternes, mais il ne s’est jamais pris pour un autre. Il était un gars d’équipe. Il y a des soirs où il restait plus longtemps sous la douche pour permettre aux autres joueurs de répondre aux questions des journalistes. Il était inondé de cadeaux et prenait plaisir à les partager avec ses coéquipiers».
Les joueurs des Bruins avaient une telle estime pour Orr qu’ils le surnommaient «God».
«Je l’ai vu réussir des jeux absolument incroyables, ajoute Vadnais. Un soir, à Oakland, il a perdu son gant à la ligne rouge. Il est revenu sur ses pas et a récupéré son gant sans jamais perdre le contrôle de la rondelle. Les partisans des Seals étaient debout pour l’applaudir. Bobby avait des patins à cinq vitesses et il contrôlait le jeu comme personne d’autre. Je suis très fier d’avoir été son compagnon d’armes. Si j’avais joué avec lui plus longtemps, je serais au Panthéon du hockey».