C’est parfois injuste, mais on se souvient plus facilement des équipes championnes que de celles qui se font battre en finale ou en demi-finale. Que voulez-vous, dirait Jean Chrétien, c’est comme ça!
Ce midi, je prends quelques minutes pour vous parler des Castors de Sherbrooke, champions de la coupe Allan au printemps 1965. Une équipe que je n’oublierai jamais.
Lorsque j’avais terminé mes cours à l’Externat classique, je faisais de l’auto-stop pour aller les voir jouer dans le vieil aréna de la rue du Parc. Habilement dirigés par le joueur-instructeur Georges Roy, ancienne gloire des Saguenéens de Chicoutimi, les Castors Seniors étaient MES HÉROS et ils offraient presque toujours un bon spectacle à leurs fidèles partisans.
En mettant les pieds dans l’aréna, tu savais que tu en aurais pour ton argent. Il y en avait pour tous les goûts: d’habiles fabricants de jeux, de solides mises en échec et deux ou trois gars capables de «dropper les mitaines».
Je ne me souviens pas du nombre de matchs auxquels j’ai pu assister, mais je n’ai pas sauté mon tour très souvent. Les Castors, je les avais dans la peau. Leurs résultats sur la patinoire m’importaient davantage que mes résultats en algèbre ou en mathématiques!
Quand je ne pouvais pas aller les voir jouer, j’écoutais les reportages de Gordon Breen et de Jean-Maurice Bilodeau sur les ondes de CKTS. C’était franchement une autre époque. Aux dernières nouvelles, Gordon Breen vivait encore dans la région d’Ottawa.
Équipe de rêve
Les vedettes de l’équipe s’appelaient René Pépin (capitaine), Georges Guilbault, Bill Dupré, Réjean Richer, Claude Cardin, Gilles Cartier, Rod Gaudreau et Simon Nolet, un ailier droit qui allait connaître une très belle carrière dans l’uniforme des Flyers de Philadelphie après un stage chez les As de Québec avec André Lacroix et Jean-Guy Gendron.
À la ligne bleue, il y avait des joueurs comme Johnny Lévesque, Lionel Robidas, Pierre Thibault et Serge Nadeau, sans oublier le vieux Georges (Roy). Le gardien de but était Serge Aubry, futur portier des Nordiques dans l’Association mondiale. Comme gardien réserviste dans les séries, on avait fait appel à un certain Rogatien Vachon, des Canadiens de Thetford-Mines.
Au printemps 1965, les Castors ont gagné la coupe Allan en balayant les Maple Leafs de Nelson, une équipe de la Colombie-Britannique dirigée par Bobby Kromm. Ils ont triomphé facilement, marquant 28 buts contre seulement 10 pour les visiteurs.
Quelques mois plus tard, ils sont allés gagner la coupe Bunny Ahearne en Suède, devenant ainsi les champions incontestés du hockey senior. Il faut savoir qu’il n’y avait alors que six équipes dans la Ligue nationale et que le hockey senior jouissait d’une immense popularité d’un bout à l’autre du Canada.
Au printemps 1966, les Castors ont de nouveau atteint la finale de la coupe Allan, mais ils se sont fait battre par une équipe de l’Ouest canadien. Dans le coin de Régina, si je me rappelle bien. En 1967 et 1968, la coupe a été gagnée par les Aigles de Drummondville et les Tigres de Victoriaville, confirmant ainsi la suprématie de la Ligue Senior provinciale.
De tous les joueurs des Castors, c’est Simon Nolet, de Saint-Odilon-de-Cranbourne (Beauce), qui est allé le plus loin. Guilbault, Cardin et Richer ont été invités au camp des Blues de Saint-Louis, mais ils n’ont pas réussi à atteindre la grande ligue.
Nolet a joué dans la LNH pendant 10 ans. Il a marqué 150 buts et il a participé à deux conquêtes de la coupe Stanley avec les Bernard Parent, Bobby Clarke, Reggie Leach, Bill Barber, Dave Schultz, Gary Dornhoefer, Moose Dupont et cie. Il a aussi eu le courage de se battre contre John Ferguson. Même qu’il a failli gagner la bataille.
Plus tard, Nolet a travaillé comme adjoint de Michel Bergeron chez les Nordiques, puis il est devenu recruteur pour les Flyers, un poste qu’il occupe depuis plus de 25 ans. Ses plus belles découvertes ont été Simon Gagné, Claude Giroux et Sean Couturier, trois joueurs qu’on aurait très bien vu dans un chandail bleu blanc rouge.
Enfin, soulignons que les exploits des Castors Seniors ont poussé le maire du temps, Armand Nadeau, à passer aux actes et à doter la Ville de Sherbrooke d’un aréna ultra-moderne: le Palais des sports. L’édifice a récemment été rénové et il sert de domicile aux Phoenix de Jocelyn Thibault.
P.S. Merci à Charles Beaudoin, de La Tribune, pour m’avoir incité à fouiller dans mes souvenirs.